Il y a quelque chose de profondément universel dans le rejet. Peu importe à quel point nous nous préparons, à quel point nous peaufinons nos œuvres, la froideur d’un refus peut ébranler les esprits les plus résolus. Pourtant, c’est précisément cette adversité qui forge les écrivains les plus tenaces et les plus talentueux. Prenons un moment pour contempler les parcours de certains des auteurs les plus célébrés de notre époque, dont les œuvres résonnent aujourd’hui dans les cœurs de millions de lecteurs, mais qui ont d’abord connu l’amertume du rejet.
Jean-Baptiste Andréa, lauréat du prestigieux Prix Goncourt 2023, est un exemple éloquent de cette résilience. Avant de savourer les lauriers de la reconnaissance, son manuscrit a été rejeté quatorze fois. Quatorze fois, il a dû essuyer des lettres de refus, se demandant si son travail verrait un jour la lumière. Il est facile de s’imaginer Andréa, la plume lourde de doutes, face à son bureau encombré de lettres impersonnelles, son rêve d’être publié vacillant comme une bougie dans le vent. Et pourtant, il a persisté.
Stephen King, dont les récits ont façonné l’imaginaire collectif depuis des décennies, a lui aussi été confronté à une série impressionnante de rejets. Trente refus avant que son premier roman ne soit accepté. Trente lettres de refus qui auraient pu le décourager, mais qui, au contraire, ont nourri sa détermination. King, avec son célèbre clou où il accrochait chaque lettre de refus, a transformé chaque non en motivation supplémentaire, chaque rejet en un pas de plus vers son succès inéluctable.
Margaret Mitchell, dont le chef-d’œuvre “Autant en emporte le vent” est devenu une référence intemporelle, a dû faire face à trente-huit refus. Ce nombre peut sembler accablant, presque insurmontable. Mais chaque refus l’a poussée à peaufiner davantage son manuscrit, à croire en la puissance de son récit malgré les portes qui se fermaient. L’écho de ses mots, aujourd’hui, nous rappelle que le génie ne se révèle souvent qu’après une lutte acharnée.
Et puis, il y a J.K. Rowling, dont les aventures de Harry Potter ont envoûté des générations de lecteurs. Douze maisons d’édition ont refusé son manuscrit avant qu’une petite maison d’édition accepte de publier les aventures du jeune sorcier. On peut imaginer Rowling, entre deux emplois, jonglant avec les défis de la vie quotidienne tout en nourrissant un monde magique dans son esprit. Son parcours est une ode à la persévérance et à la foi inébranlable en son travail.
Ces histoires partagent une leçon précieuse : le chemin vers la reconnaissance littéraire est semé d’embûches, et c’est souvent dans la persistance face au rejet que se trouve la clé du succès. Les maisons d’édition, noyées sous des avalanches de manuscrits, doivent faire des choix difficiles. Elles publient rarement plus d’une poignée de nouveaux auteurs chaque année, souvent en privilégiant ceux déjà connus. Pour les écrivains inconnus, cette réalité peut sembler décourageante, voire insurmontable.
Cependant, le rejet n’est pas la fin du voyage. Chaque lettre de refus, chaque porte fermée est une invitation à revisiter son œuvre, à l’améliorer, à croire en sa valeur. Ces grands auteurs que nous admirons aujourd’hui ont traversé les mêmes doutes, les mêmes désillusions. Leur succès n’est pas seulement le résultat de leur talent, mais aussi de leur persévérance inébranlable.
Pour illustrer ce point, examinons un exemple moins connu : celui de John Kennedy Toole. Son roman “La Conjuration des imbéciles” n’a été publié qu’après sa mort, grâce à la persistance de sa mère qui croyait en la valeur de son travail malgré les nombreux refus. Ce roman a ensuite remporté le Prix Pulitzer, preuve que même les œuvres initialement rejetées peuvent trouver leur place et leur public.
Agatha Christie, la reine du crime, a également vu son premier roman, “La Mystérieuse Affaire de Styles”, rejeté par plusieurs éditeurs avant d’être enfin publié en 1920. Sa persévérance a donné naissance à l’un des personnages les plus emblématiques de la littérature, Hercule Poirot.
George Orwell, avec son allégorie mordante “La Ferme des animaux”, a dû affronter le scepticisme de quatre éditeurs avant de voir son œuvre enfin publiée. Son succès montre que même les idées les plus controversées peuvent triompher avec persévérance.
Et le cas le plus connu est celui d’un certain Marcel Proust. En 1912, ce jeune auteur mondain inconnu se voit opposer quatre refus pour son manuscrit “Du côté de chez Swann”. Aujourd’hui, cet ouvrage est reconnu comme un pilier de la littérature moderne, mais il a fallu une foi inébranlable en son talent pour surmonter ces rejets initiaux.
En fin de compte, c’est cette résilience qui distingue les écrivains qui finissent par être publiés de ceux qui abandonnent. C’est cette capacité à continuer d’écrire, à continuer de croire en son œuvre, même lorsque tout semble perdu, qui transforme un écrivain en auteur accompli. Chaque rejet devient une pierre sur laquelle bâtir, chaque non un tremplin vers le prochain oui.
Pour les écrivains en herbe, il est crucial de se souvenir que même les plus grands ont été des inconnus un jour. Ils ont été confrontés aux mêmes obstacles, ont ressenti les mêmes doutes. Leur parcours nous enseigne que le succès n’est pas une destination, mais un voyage fait de travail acharné, de foi en soi-même et d’une capacité à se relever après chaque chute.
Les maisons d’édition peuvent être sélectives, les marchés littéraires impitoyables, mais les histoires des Andréa, King, Mitchell, Rowling, Toole, Christie, Orwell et Proust nous rappellent que la persévérance est souvent la plus grande alliée des auteurs. Le rejet est une réalité inévitable, mais il ne doit jamais être une fin en soi. Au contraire, il peut être le début d’un chemin vers une reconnaissance durable et méritée.
Alors, chers écrivains, embrassez chaque refus avec la même ferveur que vous embrasseriez un succès. Voyez-le comme une étape sur votre chemin vers la grandeur. Car qui sait ? Le prochain manuscrit que vous enverrez pourrait bien être celui qui transformera votre vie, comme il l’a fait pour tant d’autres avant vous.
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