Le 25 mars 2025, Janette Bertrand célèbre ses 100 ans. Un siècle d’existence, de combats, de mots et de projets. Journaliste, autrice, scénariste, animatrice et grande dame du féminisme québécois, elle a façonné le paysage culturel et social du Québec avec audace, tendresse et lucidité. Toujours debout, toujours engagée, Janette n’a rien perdu de son feu sacré. À cent ans, elle continue de rêver, d’écrire, de danser… et de nous inspirer. Voici l’histoire d’une femme exceptionnelle que l’âge n’a pas su ralentir.
Elle a cent ans. Oui, cent. Et pourtant, elle bouge comme si elle avait gardé un accord secret avec le temps. Une entente à l’amiable, sans trop de rides dans l’âme, sans trop de compromis non plus avec l’époque. Elle n’est pas juste une vieille dame vénérable que l’on célèbre en serrant les dents de peur de briser ses os. Elle est Janette Bertrand.
Elle est là, vive, claire, solide comme une vérité qu’on n’ose plus dire, et libre comme un mot d’enfant. Au Québec, elle est une légende vivante. Ailleurs, elle devrait être un modèle pour toutes celles et ceux qui croient qu’il faut attendre la fin de carrière pour commencer à dire ce qu’on pense.
À cent ans, Janette Bertrand n’a pas pris sa retraite. Elle l’a peut-être perdue quelque part dans une boîte, entre deux cahiers de notes, un micro et quelques chansons de Félix Leclerc. Ou peut-être l’a-t-elle simplement refusée, comme on dit non à une invitation un peu plate. Car un projet n’attend pas l’autre chez elle. Quand certains de son âge tricotent des souvenirs, Janette tricote des idées. Elle a cent ans, mais son imagination a l’âge d’un café qui vient de s’ouvrir : accueillante, chaleureuse, toujours prête à discuter du monde et de l’avenir.
Une voix qui a porté bien plus que des mots
Janette Bertrand, c’est d’abord une voix. Celle qu’on a entendue à la radio dans les années 50, puis vue à la télé, dans ces années où les femmes devaient demander la permission pour être elles-mêmes. Elle, elle n’a pas demandé. Elle s’est assise, elle a pris le micro, elle a écrit ses textes, elle a animé ses émissions. Elle a fait parler les silences, donné une place aux colères muettes. Elle a osé des sujets que même les hommes n’osaient pas aborder. La sexualité? Elle en a parlé sans détour. Les violences conjugales? Elle les a nommées. Le divorce? Elle l’a mis à l’écran.
Et puis, avec sa voix douce et sa plume ferme, elle a doucement mais sûrement remué les mentalités. Elle a dit : « Voici des histoires vraies, voici des vies, voici des femmes. » Elle a regardé le Québec droit dans les yeux et lui a demandé s’il savait écouter ses propres enfants. Et parfois, ce même Québec, pris de surprise, s’est trouvé un peu maladroit, un peu dépassé… mais toujours reconnaissant.
On ne devient pas la Québécoise du siècle sans avoir brassé un peu de poussière dans les idées. Janette Bertrand a porté le féminisme à sa façon : humaine, simple, frontale. Pas besoin de grands mots savants ou de théories compliquées. Elle parlait avec le cœur, et ça suffisait. Elle a ouvert la voie, pavé le chemin, et si aujourd’hui des jeunes femmes peuvent étudier, voter, divorcer, aimer qui elles veulent sans demander l’avis du voisin, c’est aussi grâce à Janette.
On l’a parfois critiquée, on l’a parfois moquée, mais elle n’a jamais lâché. Elle a tenu bon. Avec ses mots à elle. Parce qu’il faut le dire : Janette Bertrand, c’est une combattante au sourire franc. Pas une guerrière tapageuse, non. Une sentinelle discrète. Une lampe allumée dans la nuit des certitudes. Elle n’a pas hurlé dans les rues, elle a parlé dans les salons, dans les chaumières, dans les foyers. Et ce faisant, elle a changé le pays.
Un siècle d’amour, de combat et de réinvention
Mais attention, Janette Bertrand, ce n’est pas qu’une militante. C’est aussi une femme drôle, espiègle, qui aime danser le twist. Et à cent ans, elle danse encore. Parce que dans sa tête, la vieillesse n’est pas une prison, c’est une terrasse : un endroit d’où on voit mieux les choses, à condition d’avoir su les regarder longtemps.
Elle a écrit, joué, animé, raconté. Des pièces, des livres, des chroniques. On ne compte plus ses émissions. L’amour avec un grand A, ce n’était pas qu’une série, c’était un miroir. Celui de couples réels, avec leurs conflits, leurs doutes, leurs tendresses, leurs lâchetés. Elle n’a jamais eu peur de mettre en scène ce que d’autres préféraient cacher sous le tapis.
Et entre deux projets, elle cuisinait. Parce que oui, elle aime cuisiner. Et si un jour vous avez eu la chance de goûter à sa tarte au citron, vous savez que Janette Bertrand, c’est aussi ça : une tendresse sucrée dans un monde un peu amer.
Il faut le dire sans trembler : Janette Bertrand est un trésor vivant. Une de ces rares personnes qui ont traversé un siècle non pas en fuyant la modernité, mais en l’apprivoisant. À l’époque des réseaux sociaux, des influenceurs et de la fatigue numérique, Janette continue à parler aux jeunes avec plus de clarté que bien des algorithmes.
À ceux qui demandent quel est son secret, elle répond simplement : « Un projet n’attend pas l’autre. » Et c’est vrai. Elle a toujours un livre en cours, une conférence à préparer, une idée à partager. Elle croit à la transmission, à l’éducation, à la culture. Elle croit surtout à la vie, tant qu’il y en a. Elle ne se définit pas par ce qu’elle a fait, mais par ce qu’elle continue de faire.
Et maintenant, faisons-la connaître au monde
Chers amis du monde entier, que vous soyez à Paris, à Dakar, à Port-au-Prince, à Bruxelles, à Santiago ou à Tokyo : retenez ce nom. Janette Bertrand. C’est la Québécoise du siècle, mais c’est aussi une citoyenne du monde. Une femme qui aurait pu naître n’importe où, et qui aurait fait la même chose : donner la parole à ceux qui ne l’ont pas.
Si vous ne la connaissez pas encore, prenez quelques heures pour la découvrir. Écoutez-la parler. Regardez ses émissions. Lisez ses livres. Et surtout, observez sa façon de rire. Vous y verrez une sagesse qui ne se prend pas au sérieux, une clarté sans prétention, une liberté toute simple, mais terriblement contagieuse.
À cent ans, Janette Bertrand ne se contente pas d’avoir un âge : elle a une œuvre, une vie, un message. Elle ne vit pas dans le passé. Elle vit debout, dans le présent, et envoie des flèches dans le futur.
Alors levons nos verres, nos cœurs, nos stylos — et nos télécommandes si vous êtes devant la télé — pour lui dire merci. Merci, Janette, pour les mots, les silences, les colères utiles et les rires partagés. Merci pour les femmes, pour les hommes, pour les couples, pour les gens seuls, pour les jeunes qui doutent et les vieux qui s’endorment trop tôt.
Merci pour le Québec. Merci pour l’humain. Merci pour le twist.
Et surtout… bon anniversaire, Janette.
Et à demain. Parce qu’on le sait : tu as encore un projet.