Pendant 9 jours, une femme haïtienne a fait ce que même le rhum Barbancourt n’aurait pas osé : tenir bon sans brûler. Leen Excellent, cheffe et battante, vient d’offrir à Haïti l’un de ses plus beaux plats d’honneur : un record mondial de cuisine ininterrompue. Et tout un peuple s’est mis à table.
C’est une histoire de marmite, mais aussi de mémoire. Pendant 9 jours sans sommeil digne de ce nom – la cheffe haïtienne Leenchee Excellent, alias Cheffe Leen, a cuisiné. Mais pas juste pour nourrir des estomacs.
Elle a cuisiné pour nourrir une nation entière, pour rappeler à la terre entière que la cuisine haïtienne n’est pas seulement savoureuse : elle est vivante, résistante, et désormais… historique.
Ce mardi 15 avril 2025, à Saint-Denis, en région parisienne, Haïti n’a pas gagné une coupe de football ni un concours diplomatique (pas encore), mais elle a quelque chose de plus grand encore : une victoire humaine, culinaire, poétique, collective.
Et ce n’est pas un fait divers, c’est un fait national.
Tous derrière Leen : une diaspora qui n’a jamais déserté le cœur
Installée au restaurant Anba le Pont, au 309 avenue du Président Wilson, lieu désormais sacré par la flamme du feu et l’amour des saveurs, Cheffe Leen a démarré ce défi le samedi 6 avril, à l’heure où beaucoup hésitaient encore entre Netflix et le marché. Dès les premières heures, l’odeur du diri kolé avec haricots rouges s’est mêlée à celle des encouragements. On disait que même les voisins, d’origine pakistanaise ou maghrébine, passaient le nez en l’air, en souriant : « C’est quoi ce parfum ? C’est de la joie ?”
Ce défi, elle ne l’a pas entrepris à la légère. C’est un véritable combat contre l’épuisement, la chaleur, la routine, les douleurs aux chevilles. Car pendant ces 9 jours, elle a dû tenir debout, cuisiner sans erreur, gérer les cuissons, les assaisonnements, les livraisons, les encouragements, les rumeurs, les caméras. Tout en gardant le sourire.
Une cuisine ? Non. Un marathon poétique. Et chaque plat servi devenait une manière de dire : “Haïti n’est pas morte, elle mijote encore.”

Cheffe Leen n’a jamais été seule. Dans ce marathon digne des Jeux Olympiques du goût, la diaspora haïtienne a répondu présente, avec ses foulards, ses klaxons, ses vidéos en direct et même ses casseroles. Il y avait des gens venus de Lille, d’Orléans, de Bruxelles, de Genève. Des étudiants, des familles, des vieux chibanis, des jeunes influenceurs TikTok. Certains sont venus avec leurs enfants pour dire : “Regarde, ça c’est Haïti.”
Le chanteur Bélo, guitare à la main, a fredonné un morceau en pleine cuisson de légume. Daan Junior est arrivé avec des encouragements doux comme le sirop de canne. Le DJ Tony Mix, lui, a carrément transformé l’arrière-cuisine en mini-carnaval, playlist konpa, rabòday, et tambour inclus.
Les gens dansaient, les enfants dessinaient le drapeau haïtien, les vieux parlaient créole à voix haute sans demander la permission à personne.
Une affaire sérieuse : Guinness n’est pas venu pour manger du gâteau
Ce record n’est pas juste un délire de cuisine. C’est du sérieux. Le Guinness World Records a des règles strictes : caméra en continu, témoins officiels, pauses de cinq minutes par heure uniquement, et surtout, des preuves béton à fournir dans un dossier qui fait presque autant de pages qu’un manuscrit de Frankétienne.
Mais ce n’est pas ça qu’on retient.
Ce qu’on retient, c’est qu’en plein cœur de l’Europe, une Haïtienne a cuisiné comme nos grands-mères le faisaient : avec amour, courage et sueur au front.
Sur les fourneaux, on a vu passer akasan, bouillon poulet, bannann peze, lalo, poisson gros sel, maïs grillé, pen patat, tassot cabrit, tonmtonm même ! Et bien sûr, soup joumou, que même Napoléon aurait regretté d’avoir sous-estimée.
Et pendant qu’elle mélangeait, qu’elle tournait, qu’elle servait, elle portait cette veste brodée de messages en créole, avec des mots comme « kenbe fèm », « rasin nou fò », « Ayiti pa lan lanmò, li lan lasosyete. »
On a vu des records dans le monde. Des gens qui avalent 45 hot-dogs en 3 minutes. D’autres qui jouent au yo-yo pendant 27 heures. Mais ce que Cheffe Leen a fait… c’est autre chose.

Elle a fait tenir une mémoire, un peuple, une histoire, dans une seule casserole. Elle a battu le record du monde avec une marmite, un rêve et un couteau bien aiguisé.
Et elle l’a fait en souriant. En chantant. En dansant.
Parce que chez nous, cuisiner, ce n’est pas seulement préparer un plat. C’est convoquer les ancêtres. C’est continuer l’histoire. C’est dire qu’on est toujours là.
Le monde entier a vu cette performance. Des médias locaux, des journalistes africains, des curieux français, des artistes caribéens ont partagé la nouvelle. Et tous, dans un seul élan, ont compris que ce n’était pas un simple “record de plus”.
C’était un acte de fierté.
Un rappel que la culture haïtienne n’est pas un cliché de pauvreté. C’est un feu intérieur. Une façon d’exister. Une richesse invisible qui ne se mesure pas au PIB mais au goût.
Haïti, ce petit pays cabossé par l’histoire, ravagé et miné par des crises politiques à répétition, trahi par ses élites, oublié par ceux qui gouvernent le monde, mais jamais effacé par ceux qui le portent dans le cœur, a une fois de plus prouvé qu’elle peut impressionner le monde avec trois ingrédients et une âme.
Et maintenant ? On mange. On chante. On n’oublie pas.
Pas besoin d’armes, ni de sièges à l’ONU, ni de grands discours diplomatiques : une simple marmite, un peu de sel, du feu, de la mémoire et beaucoup d’amour ont suffi à rappeler au monde que le peuple haïtien n’est pas seulement résilient — il est créateur, rayonnant, et capable de miracles pacifiques. Pendant que les puissants du globe se battent pour du pouvoir, Haïti entre dans le Guinness des Records avec un pilon, une passion et une cheffe au sourire tenace. Et cela, c’est peut-être bien plus fort que n’importe quel traité international.
La performance est finie. Les fourneaux se refroidissent. La cuisine redevient normale. Mais plus rien ne sera jamais comme avant. Car désormais, le nom de Leenchee Excellent est inscrit dans l’histoire. Une histoire d’huile, de sueur, de foi. Une histoire d’Haïti qui, même loin de chez elle, réussit à réunir tout un peuple autour d’un seul mot : kenbe la.
Et si ce n’était pas seulement un record ? Et si c’était un appel ? Une façon de dire au monde que nous ne sommes pas les naufragés de l’histoire, mais ses cuisiniers silencieux ? Pendant que d’autres brandissent des drapeaux en papier, nous, nous faisons lever les nations dans les chaudrons.
Portée par l’énergie débordante d’un peuple entier et par les encouragements d’une foule installée devant le restaurant Anba le Pont à Saint-Denis, Cheffe Leen a tenu bon, le regard rivé vers l’impossible. Chaque minute de cuisson, elle la faisait pour celles et ceux qui n’en peuvent plus d’entendre parler d’Haïti uniquement sous l’angle de la violence. Son exploit est devenu une pause dans la douleur, une parenthèse de fierté dans un quotidien blessé.


Sur TikTok, ils sont des millions à l’avoir suivie, le souffle coupé, les yeux mouillés. En une seule diffusion en direct, elle a rassemblé plus de 340 millions de marques d’amour, de cœurs, de « likes », et de messages. Avec ses 793 575 abonnés et l’élan solidaire de la diaspora et d’Haïti, elle a même réussi à récolter les fonds nécessaires pour acheter tous les ingrédients. Le soutien est allé bien au-delà des claviers : des artistes, des citoyens ordinaires, mais aussi des responsables politiques et des organisations haïtiennes l’ont félicitée publiquement.
Si on peut 8 jours, pourquoi pas 9.
Cheffe Leen Excellent d’Haïti
Et alors que tout le monde croyait que les 8 jours (192 heures) annoncées suffiraient, elle a décidé d’aller encore plus loin, jusqu’à 9 jours. Parce qu’on ne quitte pas la scène quand la chanson n’est pas finie. Parce qu’on ne repose pas la louche quand les tambours battent encore. Et si le Guinness World Records, qui affiche actuellement un record de 119 heures, valide sa performance, alors le nom de Leenchee Excellent sera officiellement inscrit dans les pages dorées de l’histoire culinaire mondiale.
Cheffe Leen n’a pas seulement nourri des ventres, elle a ravivé une mémoire, rallumé une flamme. Elle a montré que, parfois, ce n’est pas dans les discours ni les armes que réside la grandeur d’un peuple, mais dans l’art humble et ancestral de faire mijoter l’espérance.
Merci, Cheffe Leen. Pour le sel, le feu, le cœur. Pour les 9 jours en beauté. Pour avoir montré au monde que, même en exil, même loin des nôtres, même dans la fatigue, on peut faire du pays… un plat inoubliable.