12 janvier 2010 – 12 janvier 2024. Quatorze années se sont écoulées depuis que la terre a tremblé sous nos pieds à Port-au-Prince. Quatorze ans de tumulte, de larmes, et pourtant, d’une inébranlable espérance. Aujourd’hui, Haïti se tient au bord d’un gouffre, tiraillé entre chaos et insécurité, sous la coupe de gangs armés et de dirigeants insensibles. C’est un pays ébranlé, sans gouverne, avec un président assassiné et une corruption rampante. Mais Haïti, c’est bien plus que cela.
Parler de cette catastrophe, ce n’est pas simplement aligner des mots pour émouvoir. C’est plonger dans l’âme d’un peuple qui, malgré les assauts répétés du destin, refuse de céder. Comme l’avait si justement remarqué le journaliste Alain Genestar dans son éditoral du 18 janvier 2010 sur RFI, ”parler d’Haïti n’est pas un exercice de style”, mais un devoir de mémoire et de vérité.
Le 12 janvier 2010, à 16h53, le monde d’Haïti a basculé. En vingt secondes, des vies ont été fauchées, des rêves écrasés sous des décombres impitoyables. J’étais là, témoin parmi les ruines, dans cette ville de Port-au-Prince que j’aimais tant, qui se dressait autrefois fière et magnifique. Pour la première fois, j’ai entendu la terre hurler, un cri sourd qui a secoué l’existence même.
Haïti n’est pas un pays naturellement pauvre; il a été appauvri. La corruption, les malversations, l’exploitation sans vergogne par des forces extérieures ont joué leur rôle dans cette tragédie prolongée. Le séisme n’était que le sommet visible d’un iceberg de misère et de désespoir.
Pourtant, malgré les années de faux-semblants, de troubles politiques et de crises sociales, Haïti continue de lutter. La misère est omniprésente, mais elle n’a pas éteint la flamme de résilience qui brûle dans le cœur des Haïtiens.
Hector Hyppolite et Jean René Gérôme, ces peintres illustres haïtiens, auraient sans doute capturé avec leurs pinceaux trempés dans les larmes, les cicatrices béantes de notre nation. Mais au-delà de ces toiles de douleur, il y a des histoires de courage, de détermination, et d’espoir.
Les fissures de 2010 n’ont pas été toutes colmatées. La terreur et les secousses persistent, mais l’esprit haïtien demeure imperturbable. Nager dans le pessimisme serait renoncer à notre part de responsabilité dans la reconstruction de notre patrie. Nous devons identifier les obstacles qui entravent notre progression, et unir nos forces pour édifier un avenir meilleur.
“L’union fait la force”, notre devise nationale, doit être le mantra de notre renaissance. C’est en reconnaissant nos erreurs, en apprenant de notre passé douloureux, et en travaillant ensemble pour un avenir commun que nous pourrons sortir Haïti de ses cendres.
Dans cette chronique, je ne vous offre pas seulement des mots, mais un appel à l’action, un cri du cœur pour un Haïti renouvelé, un pays où les rêves de nos enfants ne seront plus ensevelis sous les décombres, mais s’élèveront, audacieux et vivants, vers un ciel dégagé et plein de promesses.
Nous sommes Haïtiens, et notre lutte est loin d’être terminée. Mais avec chaque lever de soleil sur nos montagnes et nos plaines, nous sommes rappelés à notre devoir sacré : rebâtir, se relever, et prospérer.
La quête inlassable d’Haïti pour le renouveau
En ce 14e anniversaire du séisme, je me tiens au milieu des rues autrefois vivantes de Port-au-Prince. Les échos des cris et des pleurs ont peut-être disparu, mais les cicatrices sont toujours là, visibles sur les murs fissurés et dans les yeux de ceux qui ont survécu. Cependant, au milieu de ces ruines, il y a un battement de cœur inextinguible, une force qui pousse les Haïtiens à se tenir debout, malgré les adversités.
La réalité actuelle d’Haïti n’est pas seulement un récit de désastre et de désolation. C’est aussi une histoire de résistance et de résilience. Chaque jour, des hommes et des femmes ordinaires font des miracles ordinaires, nourrissant leurs familles, éduquant leurs enfants, bâtissant leurs communautés, grain de sable par grain de sable, brique par brique.
Il y a des histoires de jeunes entrepreneurs qui, malgré le manque de ressources, trouvent des moyens innovants de prospérer. Des artistes qui transforment la douleur en peintures, en musique, en poésie, donnant ainsi une voix à ceux qui ne peuvent pas parler. Des agriculteurs qui, malgré les sols épuisés et les conditions climatiques difficiles, continuent de cultiver la terre avec espoir et détermination.
Mais au-delà de ces histoires individuelles, il y a un appel collectif à une action significative. Le monde ne doit pas simplement voir Haïti à travers le prisme de ses calamités. Il doit reconnaître la force, la culture, et l’esprit indomptable de ses habitants.
Il est vrai que la corruption et les mauvaises politiques ont entravé notre progression. Cependant, la solution n’est pas dans l’abandon, mais dans une nouvelle vision de la gouvernance, une où le peuple haïtien est placé au centre de toutes les décisions. Une vision où la justice, l’intégrité et l’équité ne sont pas seulement des mots dans les discours, mais des principes qui guident chaque action.
En regardant vers l’avenir, nous devons nous rappeler que le chemin vers la reconstruction est long et semé d’embûches. Mais il est parcourable. L’histoire d’Haïti ne se limite pas aux récits de ceux au pouvoir, qui semblent parfois agir sans gêne, sans honte et sans scrupules. Elle est également façonnée par chacun d’entre nous, contribuant à son riche héritage. C’est dans nos mains, dans nos cœurs, et dans nos actions que réside le véritable pouvoir de changer notre destin.
Alors, en ce jour d’anniversaire, je vous invite à regarder Haïti non pas comme un pays brisé, mais comme une terre de potentiel immense. Un lieu où chaque jour offre une nouvelle opportunité de reconstruire, de réinventer, et de réimaginer.
La marche vers la résilience et l’espoir
Dans les mots évocateurs de notre illustre poète, Anthony Phelps, dans son poème “Mon pays que voici“, nous trouvons un écho à notre réalité haïtienne :
Je continue ô mon Pays ma lente marche de Poète
à travers les forêts de ta nuit
et le reflet de la Polaire
parmi l’essence et la sève
dénombrant sous l’écorce les cercles de l’aubier
Entre la liane des racines
tout un peuple affligé de silence
se déplace dans l’argileux mutisme des abîmes
et s’inscrivant dans les rétines
le mouvement ouateux a remplacé le verbe
Ces mots captent la persévérance et la quête d’espoir d’un peuple qui, malgré les épreuves, continue à avancer dans la nuit de ses défis.
Avec cette force poétique et cette résilience, avançons ensemble vers un avenir où Haïti n’est plus synonyme de souffrance, mais de force, de beauté et d’espérance. Un avenir où chaque pierre des ruines est un pas vers la reconstruction, chaque larme versée un symbole de notre détermination à ne jamais abandonner.
Dans ce poème, Phelps exprime la résilience et la force d’un peuple confronté à des épreuves incessantes, mais qui refuse de céder. Il évoque la souffrance mais aussi la résistance et la fierté d’Haïti. C’est cette même énergie que nous devons canaliser pour reconstruire notre pays. Chaque ligne du poème est un rappel que nous sommes les gardiens de notre histoire et les architectes de notre avenir.
Laissons ces mots résonner en nous et nous guider :
Je jaillirai de toi comme la source
mon chant pur t’ouvrira le chemin de la gloire
et mon cri crèvera le tympan de ta nuit
Ces paroles, pleines de promesses et d’espoir, sont un hymne à la résilience haïtienne. Elles nous rappellent que, peu importe les ténèbres qui nous entourent, notre esprit indomptable nous guidera vers un avenir meilleur. Croyons-le.
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