Poste frontalier de Saint-Bernard-de-Lacolle…
Tout commença par une interrogation aussi simple qu’éloquente, posée par une préposée à la douane canadienne. “Comment va Haïti?” Cette question, légère en apparence, déclencha en moi un flot de souvenirs et de réflexions, mêlant mon amour pour Haïti, ma terre natale, et mon affection pour le Canada, ma terre d’adoption.
Je me souviens de cette journée lumineuse, traversant la frontière, New York derrière moi, Montréal devant, un pont entre deux mondes. Depuis douze ans, je vivais au Canada, mais mon cœur battait toujours au rythme des tambours haïtiens.
À la question de la préposée, ma réponse fut instinctive et sincère: “Ça peut aller.” Haïti, ma mère, n’avait jamais été un pays de facilité, mais plutôt un berceau d’endurance et de résilience. C’était une terre où chaque sourire cachait une histoire, chaque regard portait une promesse d’avenir meilleur.
Deux amours puissants
Je me rappelle lui avoir parlé de mes douze années sans retourner en Haïti. Douze longues années durant lesquelles la nostalgie m’enveloppait, tel un enfant loin de sa mère, aspirant à son étreinte rassurante.
La préposée, curieuse, me demanda quel pays je préférais, Haïti ou le Canada. La réponse coulait de source: Haïti était ma mère, le Canada mon épouse. L’amour pour ma mère, inné, profond, inébranlable; pour mon épouse, choisi, passionné, et engagé. Deux amours différents, mais également puissants.
Haïti, je lui ai décrit, n’était pas la vision stéréotypée souvent diffusée par les médias. C’était un pays de chaleur humaine, d’histoires fascinantes, un lieu où malgré la pauvreté et les défis, la tendresse maternelle et la solidarité régnaient. Un endroit où la beauté réside dans l’authenticité de ses habitants et la richesse de sa culture.
Loin des clichés
À chaque mot, je peignais un tableau d’Haïti, loin des clichés, un portrait intime et personnel. J’ai parlé de la douceur de ses plages, de la force de ses montagnes, du goût sucré de ses fruits tropicaux. J’ai évoqué les sourires de ses enfants, la sagesse de ses anciens, et la résilience inébranlable de ses femmes.
La préposée, touchée par mes mots, me remit mon passeport en souhaitant que ma fidélité au Canada égale celle pour Haïti. Je lui assurais que ma loyauté envers le Canada était un reflet de l’éducation reçue d’Haïti, un pays qui m’a enseigné l’importance des engagements et des promesses tenues.
En quittant le poste frontière, je réalisai que ce voyage était plus qu’un simple retour à Montréal. C’était un pèlerinage intérieur, un voyage entre deux amours, deux mondes, reliant indissolublement mon passé à mon présent.
Le dialogue entre deux mondes
Haïti, malgré ses tumultes, reste gravée dans mon âme. Le Canada, là où je me trouve, ne cesse de m’enrichir. Deux pays, deux amours, un seul cœur. Et dans ce cœur, un espoir inextinguible pour un avenir où Haïti se relèvera, forte et fière, et où le Canada continuera de m’accueillir à bras ouverts.
J’invite chacun à regarder au-delà des apparences, à découvrir la richesse cachée sous les ruines apparentes. Haïti, ma mère, est plus qu’une terre de désolation; c’est un berceau d’espérance et de rêves. Et dans ce dialogue entre deux mondes, je reste un ambassadeur de l’amour, tissant des liens entre mon passé et mon avenir, entre Haïti et le Canada.
Puisse cette chronique être un pont entre les cultures, un hymne à la compréhension mutuelle, et un témoignage que l’amour pour une terre natale ne s’efface jamais, peu importe la distance ou le temps.
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